Un nouveau front d'opposants à la conclusion des Bilatérales III s'est ouvert: l'Association Boussole veut rendre impossible la reprise dynamique du droit et introduire le référendum obligatoire (double majorité) pour les traités internationaux. Pour les partisans d'un accord, la situation se complique.
Un front froid s'est abattu cette semaine sur la Suisse et l'Europe, et pour une fois, la météo n'y est pour rien. Lundi, Boussole/Europe, qui se considère comme un atelier de réflexion stratégique, s'est positionnée contre l'accord institutionnel que la Suisse est en train de négocier avec l'Union européenne, sous le nom de Bilatérales III. Cette association, d'essence à la fois alémanique et patronale, considère que «les avantages de notre place économique et notre compétitivité sont à nouveau menacés et il faut empêcher cet accord néfaste pour la Suisse». Avec son initiative populaire, elle entend s'assurer que la Suisse ne conclura ni aujourd’hui ni demain un accord avec l’UE. Ce texte veut empêcher cela en rendant impossible la reprise dynamique du droit et en introduisant un référendum obligatoire pour les traités internationaux.
Nouveau coup dur
Pour les partisans d'un rapprochement avec Bruxelles, si important pour notre économie exportatrice, c'est un coup dur qui s'ajoute aux oppositions déjà connues. Il y a d'un côté l'initiative lancée récemment par l’UDC qui entend tout entreprendre pour que la Suisse ne dépasse pas les dix millions d’habitants. Ce texte irait même jusqu’à couler la libre circulation des personnes si des clauses de sauvegarde s’avèrent inopérantes. De l'autre, il y a la fronde syndicale, orchestrée par Pierre-Yves Maillard, président de l'USS. Dans l’émission «Temps présent» de la semaine dernière, le tribun a asséné qu'«en l’état, il n’y aura pas de soutien syndical à ce projet. Mieux vaut le statu quo qu’un mauvais accord.» Le conseiller aux Etats socialiste redoute notamment des libéralisations dans le secteur de l’électricité, du rail et du marché du travail.
Ces contestations tous azimuts ont de quoi laisser pantois. Depuis que notre pays a signé des Bilatérales I, il y a exactement vingt-cinq ans, il a connu une croissance économique remarquable, qui a permis aux salaires réels de progresser plus fortement que dans les années 1990, en dépit de nombreuses crises, et de maintenir le chômage à un niveau très bas. L'UE reste un partenaire majeur pour une nation exportatrice comme la nôtre. Il suffit de voir dans quelle panade certains secteurs économiques se sont retrouvés à cause du refus de l'accord-cadre en 2021, qui a rendu des accords sectoriels obsolètes. Si elle entend continuer à prospérer, la Suisse a de toute évidence tout à gagner en développant et en consolidant la voie bilatérale avec l’Union européenne (UE).
Un travail de conviction
Alors que l'on annonce la conclusion possible d'un accord pour le début de l'an prochain, le climat d'opposition actuel menace de semer le doute dans les esprits. Rappelons toutefois qu'une enquête représentative réalisée par l'institut gfs.bern l'hiver dernier montrait que 70% des sondés approuvaient le contenu du paquet d’accords bilatéraux III. Le vent va-t-il hélas tourner? On aura une esquisse de réponse à la fin du mois d'octobre, lorsque seront connus les résultats d'un sondage que la SSR organise actuellement, avec ce même institut, sur la perception que les Suisses et les Suissesses ont de l'Union européenne. D'ici là, l'économie se doit de poursuivre son travail d'explication et de conviction sur les vertus indéniables d'un rapprochement avec nos voisins.