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Les employés non qualifiés feraient les frais du salaire minimum

    
Un salaire minimum de 4000 francs suffit-il pour vivre décemment? L'initiative populaire de l'Union syndicale suisse, sur laquelle nous votons le 18 mai, a fait de cet argument l'un de ses principaux slogans de campagne. Mais qu'en est-il réellement? Un célibataire sans enfants vivra décemment partout avec un tel salaire. Une famille monoparentale comprenant deux enfants ne s'en sortira en revanche pas sans aides, notamment pour l'assurance maladie. L'initiative ne résoudrait donc absolument rien.
Plus grave, l'introduction de ce Smic le plus élevé au monde aurait d'importantes conséquences sur la sécurité de l'emploi des employés qui ne touchent justement pas 4000 francs par mois actuellement. De nombreux magasins, restaurants, hôtels ou agriculteurs ne peuvent tout simplement pas verser une telle somme chaque mois à chacun de leurs employés.
"Aucun problème, assurent les syndicats, il suffira d'augmenter les prix, et tout le monde y trouvera son compte." Les Suisses seraient-ils donc prêts à encaisser des hausses de prix pour le bonheur de l'égalité sociale? C'est hautement improbable, comme l'a montré la flambée du franc face à l'euro en 2011: de plus en plus sensibles aux prix, les consommateurs se sont rués en France voisine, en Italie, en Allemagne pour faire leurs courses. N'iraient-ils pas passer leurs vacances de neige en France ou en Autriche si les prix des vacances de neige s'envolaient? Les étrangers continueraient-ils d'opter pour les Alpes vaudoises ou valaisannes.
Si les prix ne peuvent pas être augmentés, les employeurs devraient réduire leurs marges bénéficiaires. Est-ce possible pour toutes les boutiques, tous les restaurants, tous les agriculteurs, quelle que soit leur situation géographique et leur clientèle? Bien évidemment non! L'initiative de l'USS ne tient compte ni des différences entre branches économiques, qui font face à des situations de concurrence souvent très particulières, ni des disparités entre régions. Un palace de l'Arc lémanique a sans doute davantage de marge de manoeuvre pour ajuster ses prix qu'un hôtel familial dans une station alpine. 
La spécialisation qu'a connue notre pays a déjà fortement réduit le nombre de postes destinés aux personnes peu ou pas qualifiées proposés dans notre pays. Cette initiative serait le coup de grâce.
Le salaire minimum n'est pas un tabou, loin de là. Certaines branches et certaines entreprises le pratiquent déjà. La manière de le déterminer a été négociée avec les syndicats et les représentants du personnel. Mais les rémunérations de base ne peuvent pas être les mêmes à l'usine, dans un palace, à l'épicerie et au supermarché. Les solutions doivent être taillées sur mesure. C'est justement ce que la Suisse a fait jusqu'ici avec succès: notre chômage est l'un des plus bas du monde. Non à une initiative qui crée plus de problèmes qu'elle n'en résout! 
Claudine Amstein, directrice de la CVCI
Opinion parue dans le 24 Heures du 30 avril 2014