L’été glisse gentiment vers son côté indien, les jours raccourcissent et les vacances se rangent au rayon souvenirs… une fois encore, la période estivale aura été, en nos contrées, d’une richesse culturelle remarquable – avec en toile de fond et en vedette la Fête des Vignerons, ce spectacle total qui ne déroule ses fastes qu’une fois par génération.
Ce foisonnement a-t-il atteint son point de bascule ? L’appétit nous est venu en mangeant, festivals et autres événements originaux se sont multipliés. De la gourmandise, sommes-nous passés à l’indigestion ? Pour la première fois depuis des lustres, Paléo, le plus grand et le plus populaire des festivals suisses, n’a pas joué à guichets fermés. D’autres ont maintenu un fragile équilibre, comme la FeVi, qui a drainé une forte quantité de spectateurs et s’est terminée sur une note finale culturelle resplendissante.
Plus globalement, le monde suisse du spectacle se rationalise et se globalise, en témoigne le rachat récent de Live Music Production par la multinationale allemande DEAG, et l’implication des géants américains Live Nation et AEG.
La culture est une composante particulière de l’offre économique. Elle contribue incontestablement au rayonnement d’une région, à son identité, à sa capacité créatrice, à sa vivacité. Elle est tout à la fois dépenses, investissements et source d’emplois. Son modèle d’affaires suit invariablement la règle des trois tiers (de taille pas toujours égale, du reste) : billetterie, fonds publics et parapublics, et sponsoring. Il est intéressant de noter que de nouvelles formes de financement participatif émergent aussi, notamment pour des festivals de taille relativement modeste qui jouent sur l’enracinement très local et sur des propositions de niche, se démarquant de leurs grands frères.
Des fonds privés nécessaires à la richesse culturelle
Dans ce marché particulier qui répond malgré tout, à travers des filtres pas toujours transparents, aux lois de l’offre et de la demande, le partage du poids financier de la culture est un garant de sa pérennité. A ce titre, il faut s’interroger sérieusement sur les sentences moralisantes qui ciblent de plus en plus l’économie privée et stigmatisent des entreprises (ou des secteurs) au gré de l’air du temps. Bien sûr, il faut s’assurer que les événements culturels ne se transforment pas en panneaux publicitaires ou en opérations marketing – les dérapages sont de toute manière sanctionnés par le public, qui n’adhère pas à ces stratagèmes. Mais la tendance nouvelle est à la suspicion systématique, à la mise à l’index de toute initiative conviviale, à la condamnation des « VIP » comme s’il s’agissait de criminels en bande.
Que voulons-nous ? Une forte décroissance culturelle ? Un tarissement de l’offre et, plus grave encore, des possibilités d’expression de nos artistes ? Ou alors, que les impôts supportent la part que les sponsors auront abandonnée, faute de pouvoir valoriser justement leur apport ? C’est sans doute l’idéologie qui sous-tend certaines des voix qui veulent brider à l’excès les financements privés. Elles vont à l’encontre d’une économie du vrai partage – où les entreprises peuvent contribuer utilement et intelligemment à la prospérité de leur environnement social et culturel.
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