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Fiscalité des entreprises : pour un taux unique sans mesures compensatoires

    
Le Conseil d'Etat a dévoilé sa feuille de route en matière d'imposition des entreprises. La CVCI salue la volonté de fixer un taux unique à 13,8 %. Ce niveau doit toutefois être considéré comme un plafond. Des mesures compensatoires sont en outre excessives compte tenu de la forte progression des impôts payés par les sociétés au cours des dix dernières années. Le canton de Vaud a dévoilé le 4 avril dernier sa stratégie fiscale pour les entreprises. Présentée comme une "feuille de route", elle prévoit un taux unique d'imposition des bénéfices de 13,8 % à l'horizon 2020, contre 23 % environ actuellement. Cela permettra de résoudre la question des statuts spéciaux cantonaux, qui permettaient d'exempter d'impôt les revenus de certaines sociétés actives à l'international et que la Suisse s'est engagée à abandonner sous la pression conjointe de l'Union européenne et de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

La Chambre vaudoise du commerce et de l'industrie préconise cette voie depuis plus de trois ans et salue par conséquent la divulgation de cette feuille de route. Elle restaure une prévisibilité que les sociétés concernées au premier chef - les entreprises à vocation internationale - appelaient de leurs vœux depuis longtemps.

Cette réforme cantonale de l'imposition des entreprises est prioritaire. Elle doit passer avant tout autre chantier fiscal, car nous jouons avec elle l'avenir de la prospérité de notre canton. Si Vaud a pu rester compétitif et s'afficher dans le peloton des cantons les plus dynamiques du pays malgré une fiscalité parmi les plus lourdes de Suisse, c'est essentiellement grâce aux statuts spéciaux. Ils "effaçaient" notre désavantage concurrentiel. 
Sans un abaissement général de l'imposition des entreprises en contrepartie de l'abandon des statuts spéciaux, le canton de Vaud prendrait le risque d'un départ de nombreuses entreprises internationales. Elles iraient inévitablement chercher ailleurs en Suisse, ou à l'étranger, des conditions fiscales plus attrayantes. Les sociétés sous-traitantes, essentiellement des PME locales, seraient également affectées. Une rapide montée du chômage ainsi qu'une détérioration des finances publiques s'ensuivraient.

La voie du taux unique est donc la bonne. Et 13,8 % constitue une limite à ne pas dépasser. N'oublions pas qu'à un tel niveau, les entreprises aujourd'hui au bénéfice de statuts spéciaux paieront plusieurs points de pourcentage d'impôt en plus. A titre de comparaison, Genève travaille sur un taux de 13 %. L'Irlande est à 12,5 %.  

Une chose est sûre : le canton a les moyens de cette stratégie. Sans des amortissements extraordinaires massifs - qui ont permis d'assainir la caisse de pension de l'Etat de Vaud en moins de deux ans -, le bénéfice du canton se serait inscrit à 849,1 millions de francs l'an dernier. Sur un budget de 9,2 milliards de francs, l'excédent avoisine donc les 10 % du budget. Et cela fait au moins sept ans que ce scénario se reproduit - avec des chiffres de pareille ampleur - avec une régularité de métronome.

Les entreprises vaudoises ont largement contribué à l'assainissement des finances publiques. Les recettes fiscales provenant de l'impôt sur le bénéfice ont triplé en dix ans, dépassant toutes les attentes. L'an dernier, elles ont encore crû 4,5 % par rapport à 2012, pour atteindre 638 millions de francs, malgré une baisse d'un demi-point du taux d'imposition.

On peine à croire que l'introduction du taux unique ferait "perdre" des centaines de millions de francs au canton et aux communes (le Conseil d'Etat parle de 450 millions). La baisse de la fiscalité des entreprises introduite à Neuchâtel a entraîné une hausse des revenus de l'impôt sur le bénéfice. Dans le canton de Vaud, il est vrai que les PME verront leur taux d'impôt divisé par deux, mais les multinationales paieront davantage, comme nous l'avons vu.

Dans un tel contexte, les compensations à hauteur de 100 millions de francs que le Conseil d'Etat envisage de demander aux entreprises, pour augmenter les allocations familiales et développer les structures d'accueil de jour des enfants, sont exagérées. Les allocations familiales viennent d'être augmentées (de 30 francs par mois cette année pour les enfants et de 50 francs pour les jeunes en formation). Une deuxième hausse est programmée pour 2017 (de respectivement 20 francs et 30 francs). Ce paquet représente déjà 100 millions de francs. Quant aux crèches, les entreprises versent déjà des contributions proportionnellement supérieures à ce qu'elles s'étaient engagées à acquitter.

Claudine Amstein, directrice de la CVCI
(Pour LeJournal CVCI n° 50 - mai 2014)
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Oriane Engel

Responsable du dossier Politique sociale et santé