Le canton de Vaud toujours à la traîne en matière d’imposition des personnes physiques
- En comparaison intercantonale, la fiscalité vaudoise des personnes physiques reste anormalement élevée tant au niveau de l’impôt sur le revenu que de l’impôt sur la fortune.
- Malgré les déductions introduites au cours de ces dernières années, la position en comparaison intercantonale des personnes physiques vaudoises s’acquittant d’un impôt s’est généralement dégradée depuis la dernière édition du Baromètre.
- La baisse récemment votée de 3,5% de l'impôt cantonal sur le revenu, applicable à partir de 2024, n'améliorera pas sensiblement la compétitivité du canton en matière d'imposition des personnes physiques.
- Le taux d'imposition des bénéfices des entreprises dans le canton de Vaud est de 14%, soit légèrement inférieur à la moyenne suisse (14,60%).
- Dans le cadre de l’implémentation à venir de l’imposition minimale mondiale de 15%, le canton de Vaud a décidé d’introduire une imposition progressive de 14,7% pour la part du bénéfice net imposable des entreprises excédant CHF 10 millions, dès 2025. Pour maintenir son attractivité, le canton de Vaud doit développer de nouvelles mesures.
Avec le «Baromètre fiscal vaudois», KPMG et la Chambre vaudoise du commerce et de l’industrie (CVCI) ont examiné l’attractivité fiscale du canton de Vaud pour les personnes morales et physiques. Par rapport à l’imposition des personnes morales, le canton de Vaud figure actuellement parmi les cantons affichant un taux d’impôt légèrement inférieur à la moyenne Suisse, mais reste toujours à la traîne en matière de fiscalité des personnes physiques. Le total des recettes fiscales vaudoises a augmenté, passant de CHF 6’044 millions en 2016 à CHF 6'750 millions en 2022.
Le canton de Vaud : attractif pour les entreprises
Le canton de Vaud, avec son taux d'imposition des bénéfices à 14%, se situe légèrement en dessous de la moyenne suisse de 14,6%. Comme dans d'autres cantons, les entreprises vaudoises bénéficient de différentes mesures d’incitations fiscales qui ont été introduites dans le cadre de la réforme fiscale fédérale et du financement de l'AVS (RFFA). Grâce à ces mesures, les entreprises vaudoises peuvent réduire leur taux d'imposition sur le bénéfice jusqu'à 11,03% au maximum (moyenne suisse : 10,95%).
Effets de l'introduction prévue de l'imposition minimale mondiale sur le canton de Vaud
Avec l’introduction de l’imposition minimale mondiale (Pilier 2), le taux d’impôt sur le bénéfice va perdre en importance en tant que facteur de différenciation contribuant à l’attractivité du canton vis-à-vis de juridictions ayant un coût de la vie plus compétitif.
Dans le cadre du Pilier 2, le canton de Vaud a décidé d’introduire un barème progressif pour l’impôt sur le bénéfice dès 2025. Ainsi, le taux d’impôt effectif demeurera identique à celui appliqué à ce jour, à savoir 14%, pour la part des bénéfices imposables inférieure à CHF 10 millions, alors que la part excédentaire sera imposable à un taux de 14,7%.
Considérant que seules 2,4% des sociétés vaudoises disposent d’un résultat net imposable supérieur à
CHF 1 million (les statistiques vaudoises ne publient pas le pourcentage des entreprises vaudoises réalisant un résultat supérieur à CHF 10 millions), une part minime d’entre elles sont concernées par cette augmentation.
Les mesures d’incitations fiscales bien connues du canton de Vaud telles que les exonérations fiscales temporaires et les mesures RFFA continueront de déployer leurs effets pour les sociétés vaudoises non concernées par l’imposition minimale mondiale, alors que ces derniers risquent d’être réduits à néant pour celles concernées par le Pilier 2.
« Ainsi, le canton de Vaud doit réfléchir à l’élaboration de nouvelles mesures, lesquelles ne doivent pas avoir d’effets négatifs sur l’imposition minimale mondiale, ou le moins possible. Pour ce faire, elles doivent être notamment acceptées par l’OCDE et l’UE » commente Vincent Thalmann, Responsable pour la Suisse romande de la fiscalité des entreprises chez KPMG.
Personnes physiques lourdement taxées
Contrairement à l’imposition des entreprises, celle des personnes physiques n’a que peu changé ces dernières années. La moyenne des taux maximum d’imposition du revenu n’a pratiquement pas évolué en Suisse. Ainsi, le taux était de 34,9% en 2007 et demeure presque au même niveau, à 33,45% en 2023.
Le canton de Vaud connaît une des impositions les plus élevées de Suisse, avec un taux d’imposition maximal de 41,50% pour les personnes physiques. Seuls les cantons de Genève (44,47%) et de Bâle-Campagne (42,17%) appliquent encore des taux plafonds plus élevés au niveau de l’imposition individuelle.
Vaud fait partie des cantons de Suisse frappant le plus lourdement les revenus et ce pour l’ensemble des classes moyennes à supérieures. « Par ailleurs, malgré les multiples déductions introduites au cours de ces dernières années, les relevés réalisés lors des différentes éditions du « Baromètre fiscal vaudois » montrent que la position du contribuable vaudois en comparaison intercantonale tend généralement à empirer », relève Janick Pochon, responsable pour le canton de Vaud de la fiscalité des entreprises chez KPMG. Ce positionnement détonne par rapport à ceux d’autres cantons, tels ceux de Genève ou de Zurich. Ainsi, une famille vaudoise de deux enfants disposant d’un revenu brut de CHF 125'000, soit avant toute déduction fiscale ou sociale, devra s’acquitter d’une charge fiscale de près du double qu’une famille genevoise (+91%) ou zurichoise (+86%).
Au niveau de la fortune imposable, le canton de Vaud se positionne également parmi les cantons appliquant la plus lourde imposition de Suisse. Outre le positionnement, le différentiel de taux entre les cantons est particulièrement important. Ainsi, une famille vaudoise avec deux enfants disposant d’une fortune nette de CHF 150’000 paie un impôt quinze fois supérieur à un ménage genevois et huit fois supérieur à une famille zurichoise.
La baisse votée « 3,5% » et l'initiative « -12% » : peu de changement
« L’imposition vaudoise est la plus lourde en comparaison intercantonale. Elle est un repoussoir pour l’ensemble des contribuables, en particulier pour ceux à forte capacité contributive. Le risque d’un exode existe, quant à en attirer de nouveaux, cela ne semble pas à l’ordre du jour. L’initiative « baisse d’impôt pour tous », qui prévoit un abattement de 12%, n'améliorerait pas fondamentalement notre positionnement intercantonal, mais elle permettrait déjà de soulager substantiellement les contribuables vaudois », souligne Philippe Miauton, directeur de la CVCI. Quant à l’abattement de 3,5% décidé au Grand Conseil, son impact sur le positionnement du canton à l’échelle intercantonale est pratiquement nul, d’autant plus qu’il n’inclut pas la fortune. « Une réforme complète de la fiscalité vaudoise des personnes physiques doit donc être mise en œuvre. »
Fanny Oberson Gross
Responsable Communication et RH